Jean-Marc Samuel, fervent défenseur du transport sur le canal des Deux-Mers

Nous lançons les « Portraits Canalfriends » afin de vous présenter les passionnés de notre communauté. Merci à Sam, (Jean-Marc Samuel) d’ouvrir cette rubrique.

Le Tourmente ©Jean-Marc Samuel

Sam, on t’associe souvent au Tourmente, ton bateau de transport. Viens-tu d’une famille de bateliers ?

A l’origine, je suis menuisier autodidacte.  J’ai juste été formé chez un antiquaire dans les Alpes-de-Haute-Provence. Mon premier contact avec les bateaux date de 1982, quand des amis qui venaient d’en acheter un, m’ont demandé de l’aménager. Puis en 1995, le fondateur de l’Occitane m’a confié l’aménagement du bateau qu’il voulait transformer en show-room. Parti pour 15 jours à Saint Jean de Losne (Côte-d’Or), sur la Saône, j’y suis resté au final 7 ans. 

Le Willy ©Jean-Marc Samuel

Est-ce à partir de ce moment-là que tu habites sur un bateau ?

En effet, en 1995, j’acquière le Willy, luxemotor, bateau de commerce qui naviguait sur le canal du Midi jusqu’en 1967. Il a transporté des palettes de vin entre Valence (Drôme) et Conflans Sainte Honorine (Yvelines). Ma fille Diane y est née en 2000. Il fut mon lieu d’habitation pendant des années. Il a fêté ses 100 ans en 2023 en effectuant un voyage de Toulouse à Rouen.

Le Tourmente à Bordeaux ©Jean-Marc Samuel

Et comment est arrivé le Tourmente ?

Deux jours après la naissance de Diane, nous mettions le Willy en cale sèche aux cales du Radoub à Toulouse pour son entretien. Le Tourmente était juste à côté, à vendre. Nous avions des projets et la perspective de nous orienter vers le transport fluvial. Mais déjà il fallait le remettre en état. Comme le Willy, c’est un luxemotor hollandais, construit en 1934 pour transporter du bitume entre Blaye et Toulouse.

Festival Convivencia ©Jean-Marc Samuel

Est-ce à ce moment-là que tu t’orientes vers le transport fluvial ?

Oui c’était le projet, mais j’ai d’abord travaillé avec l’association Convivencia qui cherchait un deuxième bateau pour son festival qu’elle organise en juillet dans les ports du canal des Deux-Mers. Ce partenariat dure depuis 2001.

En 2007, je suis parti à Bordeaux pour livrer au Belem du vin chargé à Béziers ; on commençait à parler de transport à la voile. En 2008, pour la première fois, le Tourmente a transporté du vin du Minervois de Toulouse à Lyon. En 2011, et pendant 10 ans, de Sète à Bordeaux, il a fait son « Voyage entre 2 mers » transportant et proposant à la vente avec son « comptoir du canal », des produits des territoires traversés.

Le comptoir du canal sur le Tourmente ©Jean-Marc Samuel

A cette époque, il s’agissait de faire de la pédagogie pour montrer que le transport fluvial avait du sens sur le canal des Deux-Mers (www.vivre-le-canal.fr)

En 2021, avec le collectif Garonne Fertile, nous avons organisé un voyage pilote de transport de produits alimentaires entre Damazan (Lot-et-Garonne) et Bordeaux.

Transport de vin sur le Tourmente ©Canalfriends

Cela fait donc près de 24 ans que tu agis en faveur du transport fluvial. Qu’est-ce qui te donne encore envie de d’agir ?

Tout d’abord, l’adhésion et le soutien du public à chaque étape. Et aujourd’hui, l’obtention de contrats de transport avec des professionnels pour des produits très divers (café, transformateurs électriques, déchets à valoriser), qui nous permet de passer de l’expérimentation à la concrétisation. Des entreprises commencent à considérer le transport fluvial comme une alternative à la route. Elles ont compris que ce type de transport émet nettement moins de CO2 que les camions. De leur côté, les collectivités voient bien l’intérêt d’éviter la congestion des routes. Qui sait que 22 millions de marchandises ont transité sur la Seine en 2022 ? Personne ne les voit passer, cela ne génère ni bouchon, ni accident, ni nuisance sonore.

Transport de transformateurs électriques sur le Toumente ©Jean-Marc Samuel

Le métier de bateliers se transmet-il toujours aux enfants ? comment vois-tu la relève ?

C’est toujours le cas, mais des jeunes, hommes et femmes, qui ne sont pas issus du milieu s’y intéressent. Mais ils sont plus attirés par les grands bateaux avec beaucoup de technologies et donc plus faciles à naviguer. Sur des bateaux comme le Tourmente, sur le canal des 2 mers, c’est plus physique. Plus globalement, le transport est un secteur qui a du mal à recruter. Il faudrait davantage communiquer sur les spécificités du transport fluvial et les évolutions en cours des bateaux pour réduire leur impact. Par exemple avec l’évolution du carburant ; en passant du diesel à l’HVO (huile végétale et huile recyclée), un bateau aura 90% d’émissions de CO2 en moins par rapport au transport routier.

Transport de plastiques agricoles à recycler ©Jean-Marc Samuel

Revenons au canal des Deux-Mers, peux-tu nous qualifier chaque voie d’eau qui le compose ?

Le canal du Midi : c’est un très beau canal. Il est en phase de renaissance. Après l’abattage des platanes lié au chancre coloré, les nouvelles plantations modifient le paysage. Elles nous permettent de voir plus loin et nous font prendre conscience que c’est un espace vivant.

Le canal de Jonction et le canal de la Robine : ils sont vraiment magiques et mériteraient d’être davantage mis en valeur.

Le canal de Garonne : très beaux paysages au calme apaisant. Il a un gros potentiel en termes de transport et de tourisme.

La Garonne : magnifique avec une arrivée somptueuse sur Bordeaux. Sensations très particulières quand il faut naviguer dans le brouillard.

Le Tourmente sur le Canal du Midi ©Jean-Marc Samuel

En vacances, tu es plutôt sur l’eau ou sur terre ?

Je ne prends pas de vacances. Je vis sur le Tourmente toute l’année. Sur terre, je me déplace principalement en train (38 000km en 2023).

Port de l’Embouchure à Toulouse ©Jean-Marc Samuel

Est-ce qu’on vit différemment sur un bateau ?

Sur un bateau, tout est rare ; on fait attention à consommer le minimum que ce soit de l’eau ou de l’énergie. Comme il n’y a pas beaucoup de place, on n’achète que le nécessaire. La notion de confort est réduite.

Phare des Onglous ©Jean-Marc Samuel

Et pour finir…Canalfriends, c’est quoi pour toi ?

Deux femmes enthousiastes et passionnées qui font la promotion d’une voie d’eau qui en a besoin et créent du lien entre les usagers.

Rencontres Canalfriends 2019 à l’espace EDF Bazacle de Toulouse ©Marine Leroy

Pour en savoir plus, sur le canal des Deux-Mers, téléchargez gratuitement nos guides de voyages bilingues “Canal du Midi, ses rigoles, canaux de Jonction & de la Robine” et “Canal de Garonne, Garonne et estuaire de la Gironde” et nos guides Junior “Canal du Midi” et “Canal de Garonne”

Retrouvez la liste de nos bonnes adresses de Toulouse à la Méditerranée et de Toulouse à l’Atlantique

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3 thoughts on “Jean-Marc Samuel, fervent défenseur du transport sur le canal des Deux-Mers

    • Author gravatar

      Bonjour
      Marin à voile breton, je souhaitais emprunter le canal du midi vers la Méditerranée mais cela ne s’est pas fait. Enfant habitant près du Rhin, je suis impressionné par le trafic fluvial avec des pavillons des pays limitrophes (très belles unités). Convaincu de l’utilité des bateaux du ferroutage et effaré par le nombre de poids lourds qui ne font que transiter par notre pays, il serait bon d’agir dans ce sens . Hier, revenant d’Alsace vers La Rochelle, les aires d’autoroute débordaient de PL immobilisés. J’apprécie beaucoup votre démarche et je vous suis, conscient de la difficulté de faire bouger les choses.
      Continuez
      Bien cordialement
      P Burel

    • Author gravatar

      Bonjour
      Suite à la fermeture du canal pour cause de pont endommagé, avez vous connaissance de la création d’un collectif d’usagers coincés en amont et en aval du pont de Tersac?
      A votre avis’ comment pourrions nous nous concerter pour défendre les intérêts des usagers face aux VNF?
      merci de me lire
      Très cordialement
      Vincent Crespy
      Bateau Rochan IV coincé à la halte nautique du pont des Sables

    • Author gravatar

      Bonjour Vincent,

      Il n’y a pas de collectif uniquement réuni autour de cet incident. Mais il y a des associations, comme l’ANPEI pour les plaisanciers, ou Agir pour le fluvial, que je représente, qui sont les interlocuteurs de VNF. Concernant le pont de Tersac, il y aurait peut-être une demarche à envisager auprès de VNF en listant les conséquences de la fermture à la navigation. Les plaisanciers de Beaucaire bloqués par la fermeture de l’écluse de Nourriguier ont reçu des indemnisations si je ne me trompe pas.

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